Depuis la fin des années soixante-dix, la notion de mémoire tantôt valorisée comme moyen d'accès privilégié pour la connaissance des " silencieux de l'histoire ", tantôt disqualifiée par ceux qui y voient un ancrage dans le passé au détriment du présent, occupe le devant de la scène - se substituant parfois à la notion de culture. Différentes formes de présence du passé viennent s'y concentrer, réelles ou métaphoriques, vives ou résiduelles : lieux de mémoire, commémorations, mémoriaux, devoir de mémoire, souvenir et contre-souvenir, art et tourismes de la mémoire, réparation et pardon... De nouvelles réalités incitent à penser que le rapport au passé s'est modifié, renversant la hiérarchie ente histoire (ayant une finalité de connaissance) et mémoire (ayant une visée identitaire). Ces phénomènes soulèvent ainsi bien des questions : comment s'effectue la transition de l'expérience à la mémoire ? La mémoire doit-elle être " juste " ou encore " partagée " ? De qui doivent venir la reconnaissance, la réparation et l'inscription dans une mémoire dite " nationale " : de l'histoire - discours explicatif et critique, de l'Etat - dont la position vis-à-vis du phénomène est souvent ambiguë ? Dans ce volume, les lecteurs prendront connaissance du projet du futur " Musée français de l'Immigration ", suivront la cérémonie de remise de médaille de " Juste parmi les Nations ", verront la façon dont sont vécus les exils au fil des générations, comme le rôle obscur de l'intelligentsia roumaine sous Ceaucescu, entendront les témoignages des enfants des kollektiv soviétiques, découvriront le mythe fondateur de la culture antillaise... autant de thèmes gui donnent la parole à la mémoire pour mieux en cerner les complexités.