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Cette indépendance de l'Armée dura en France jusqu'à M de Louvois, qui, le premier, la soumit aux bureaux et la remit, pieds et poings liés, dans la main du Pouvoir souverain. Il n'y éprouva pas peu de résistance, et les derniers défenseurs de la Liberté généreuse des hommes de guerre furent ces rudes et francs gentilshommes, qui ne voulaient amener leur famille de soldats à l'Armée que pour aller en guerre. La destinée d'une Armée moderne est tout autre que celle-là, et la centralisation des Pouvoirs l'a faite ce qu'elle est. C'est un corps séparé du grand corps de la Nation, et qui semble le corps d'un enfant, tant il marche en arrière pour l'intelligence et tant il lui est défendu de grandir. L'Armée moderne, sitôt qu'elle cesse d'être en guerre, devient une sorte de gendarmerie. Elle se sent honteuse d'elle-même, et ne sait ni ce qu'elle fait ni ce qu'elle est ; elle se demande sans cesse si elle est esclave ou reine de l'Etat : ce corps cherche partout son âme et ne la trouve pas.