La chasse et autres essais

Les trois essais de Louis Condominas réunis dans ce volume ont pour cadre le Vietnam, plus particulièrement la région montagneuse du Centre Trung Ky (l'Annam d'autrefois). En effet, seule la biographie de Lipiou, mon grand-oncle, qui repose sur des souvenirs du début des années vingt, se déroule dans la région de Haïphong. Mon père a écrit La Chasse à la fin de sa vie. Il ne faut pas confondre ces récits avec les exploits de riches amateurs s'offrant le tir d'un éléphant ou d'un tigre au cours d'une expédition chèrement payée, de quelques semaines.
Mon père s'est amusé à me rappeler quelques-unes de ses promenades cynégétiques dont il m'avait conté le déroulement quelques heures après qu'elles aient eu lieu. Il faut ici les restituer dans leur contexte : elles apparaissent alors comme des bulles éclatant à la surface d'un lac d'un quart de siècle de longueur. Les riches s'offrent deux ou trois semaines de vie " à la dure " et en ramènent des aventures un peu gonflées ; ceux qui, comme Louis Condominas, vivent ce genre de vie de façon continue se contentent de souvenirs qui ont émaillé leur traintrain quotidien.
Aucune vantardise dans les propos paternels, mais humour, poésie, amour de la forêt et des hommes qui l'habitent, et respect des éléphants, tigres, chevreuils ou sangliers qu'il a fallu éliminer, soit pour protéger les cultures et la vie des villageois, soit pour procurer de la nourriture à son entourage. Le dernier essai, Les Moïs du haut Sông Tranh est le seul texte tiré d'une montagne de notes qui périrent par le feu lors du coup de force japonais.
Conservé à l'Ecole Française d'Extrême-Orient, il a été publié immédiatement après la Seconde Guerre mondiale (malheureusement les belles photographies qui l'accompagnaient ont disparu entre Hanoi et Saïgon). On y trouvera une esquisse ethnographique écrite par un amateur, autodidacte et poète, d'une population qu'il a pratiquement découverte, chez laquelle il a séjourné plusieurs années et qu'il a aimée.