Biographie de Hervé Inglebert
De l'Atlantique à l'Euphrate et de la mer du Nord au Nil, la civilisation romaine a diffusé ses modèles : villes, monuments, inscriptions, sculptures, fresques, mosaïques, monnaies, citoyenneté, institutions civiques, droit, culture lettrée, spectacles. Durant des siècles, elle concerna des dizaines de peuples et des millions de personnes. Après sa disparition, le rêve impérial, le droit romain, la culture antique et le christianisme comme religion d'Etat furent pour un millénaire les références de l'Europe byzantine ou occidentale.
Cet ouvrage montre comment la civilisation romaine, fondée sur les relations entre le pouvoir romain et les cités locales, s'est formée, s'est étendue, puis, selon les cas, comment elle a disparu ou s'est transformée.
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La postérité de la civilisation romaine relève presque du paradoxe, tant les premiers Romains étaient frustes et restèrent longtemps moins civilisés que leurs voisins Grecs et même que bon nombre de leurs devanciers orientaux.
Les débats déjà anciens entre romanistes et hellénistes conduisaient souvent les seconds à réduire les éléments proprement romains de la civilisation romaine aux domaines où ils ne s'étaient pas inspirés des Grecs, principalement le droit et certaines innovations architecturales. Tant de traits distinctifs de la civilisation romaine sont inspirés, pour ne pas dire purement et simplement imités des Grecs, à commencer par la vie en cité, la littérature, les savoirs et une large partie de la mythologie, la religion étant surtout d'origine étrusque.
Cicéron reconnaissait lui-même dans les Tusculanes que les Grecs avaient surpassé les Romains dans tous les domaines autres que les mours, la politique et la guerre. Même les modèles politiques de l'Empire sont d'origine grecque, et l'Empire d'Orient, s'il se disait romain, était essentiellement grec. Si la civilisation romaine fut bien un processus d'acculturation de l'Occident, qui rejoignit le bassin méditerranéen dans la civilisation, le résultat de la transformation se ressent fortement des influences grecques dont la civilisation romaine était si imprégnée.
Voilà presque le tableau qu'un helléniste facétieux dresserait de la civilisation romaine, et voici dans ce livre la réponse de trois éminents romanistes à la question de la civilisation romaine. Sans nier les emprunts et les influences étrangères, ils font le point des dernières recherches pour mettre en évidence les caractères propres à la civilisation romaine. De l'imitation au sens classique, c'est-à-dire la conjugaison de son propre génie avec celui de ses modèles, aux réalisations plus proprement romaines, voici le récit d'une civilisation en marche, de sa naissance, de ses évolutions et, dans certains cas, de sa disparition, toujours féconde.
(P.
Prigent)