" Le temps s'étire et se contracte. Deux journées en une. Deux, cent, mille. Mon corps se dédouble. Franco-Anglais. Entrepreneur SDF. Fidèle adultère.... > Lire la suite
" Le temps s'étire et se contracte. Deux journées en une. Deux, cent, mille. Mon corps se dédouble. Franco-Anglais. Entrepreneur SDF. Fidèle adultère. Sauveur coupable. Frère et faux. Faux frère. Ma main voudrait caresser - mais elle s'agrippe, ripe, s'accroche - les doigts sont des griffes, elle est ma proie - la déchiqueter, la réduire en pièces, un amas de chair, des cheveux qui se détachent, des dents qui se déboîtent. La phrase lancinante, entre les tempes. This is not a love song. Je veux l'entendre crier - pas gémir. Des hurlements de louve à qui l'on prend ses petits. Il y a une heure. Il y a deux heures. Je n'ai pas voulu me laisser entraîner. J'ai refusé la rencontre avec Étienne. J'ai refusé que nous nous rendions à l'endroit exact. Là où. J'ai refusé en bloc les souvenirs et les regrets. Je ne plongerai pas dans un février où je n'étais pas. "
Vincent a la quarantaine conquérante de ceux qui ont su se faire une place au soleil, loin de la "lose" de leurs années de jeunesse. Jusqu'à ce mois de juillet où il revient dans sa ville natale, dix ans après l'avoir fuie sans un regard pour ceux qu'il laissait derrière lui.
Des hurlements de louve à qui l’on prend ses petits. Je ne reconnais pas ma bouche
Je ne reconnais pas la sienne
Les lèvres sèches, les gerçures qui se creusent
Mes incisives cherchent le sang
Le goût du métal
Elle suffoque
Elle cherche à s’échapper mais je la retiens prisonnière, là, entre mes jambes, entre mes bras
Entre moi
Entre en moi.La montée de la sève
Lente et douloureuse. Ma tête sous son menton
Le dos rond, prêt à bondir
Les poings fermés de chaque côté de son visage
Refuser l’explosion. Rester au bord.Tout au bord.Retarder
Rester dans l’évitable
Suspendre
Attendre la faim de l’autre
Sa soif
Son aridité
Ses appels au secours
Les soubresauts de son corps qui cherche l’irrigation
Entendre ses membres se bander pour frapper
Sentir les muscles de son ventre agir
Enserrer
Interdire la fuite.Tu ne m’échapperas pas
Ceci n’est pas une chanson d’amour. Il y a une heure.Il y a deux heures. Quand je fermais les yeux, je ne voyais que des gares de triage, des wagons, des aiguillages
Le vent, aussi
Le vent, surtout
Le vent qui coupe la respiration
Sans le vent, la température resterait supportable
Mais il gèle le sang
Il transforme la peau en un papier friable et douloureux
Je ne suis qu’une crevasse Il y a une heure.Il y a deux heures. Je n’ai pas voulu me laisser entraîner
J’ai refusé la rencontre avec Étienne
J’ai refusé que nous nous rendions à l’endroit exact
Là où
J’ai refusé en bloc les souvenirs et les regrets
L’agression des images
L’invasion des sensations
Je ne plongerai pas dans un février où je n’étais pas.À la place, la fuite.À la place, la fièvre.À la place de mon faux frère, ma vraie belle-sœur. Je ne sais pas comment nous en sommes arrivés là
Je sais seulement que c’est moi qui ai cédé
Que je suis celui qui a murmuréviens
Viens
Celui qui a pris le bras
Une incitation
Un ordre auquel je devinais qu’elle allait obéir
Parce qu’elle était fourbue
Que les mots l’avaient épuisée
Qu’elle ne voulait plus que le silence. Le silence et la vie.Le puzzle vivant des cuisses, des avant-bras et des langues.Les langues qui se cherchent
Les langues qui humectent et dilatent.Les langues qui font perdre pied. Je n’ai jamais joui en anglais.L’intimité reste française. Je m’appelle Vincent.Cette femme qui se tord sous moi est ma belle-sœur.Ce n’est pas la culpabilité qui décuple son plaisir.Ce n’est pas non plus mon savoir-faire.Ce sont les hormones
Les stimulations médicales de la fertilité
L’ovulation
Et la douleur
Toute cette douleur. À aucun moment elle ne m’a nommé.À aucun moment elle n’a pensé à moi.À aucun moment je n’ai voulu son bien. Célébrons les corps.